La XIII ème chambre de la Cour d’Appel de Paris, baptisée, René Parodi, du nom du magistrat, arrêté par les Nazis, mort en prison, a abrité, l’audience de l’appel introduite par la République de Guinée-équatoriale, en vue de la restitution de l’immeuble sis au 40-42, avenue Foch qui accueille sa représentation diplomatique en France.
Lequel est confisqué depuis 2012 par la justice française dans le cadre de l’affaire des « Biens mal acquis ». Une saisie que la Guinée-équatoriale, fort de sa double qualité de victime et de propriétaire du bien litigieux, puisqu’elle a bien payé l’impôt sur la plus-value relative à la cession des droits sociaux, et produit la convention de cession des parts, conteste.
L’audience qui s’est tenue, en présence des avocats de la partie demanderesse, Maîtres Emmanuel Marsigny, Kevin Grossman et Francisco Evuy Nguema Mikué, a également bénéficié de la participation du ministre délégué à la justice, du culte et des institutions pénitentiaires, Juan Olo Mba Nseng et de Miguel Oyono Ndong Mifumu, le représentant diplomatique en poste. Si l’avocat général, Serges Roquès dans sa réquisition, a soutenu le rejet.
Parce qu’il doute de la bonne foi de Guinée, ses avocats en revanche, ont détaillé avec arguments à l’appui, la bonne foi de leur client, qui selon eux, réclame la pleine jouissance de cet immeuble, ni pour le vice-président de la Guinée-équatoriale, Teodoro Nguema Obiang Mangué, ni pour son président, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, ni pour sa famille, mais pour l’ensemble de la population de ce pays.
Puisque, une ambassade, est avant tout, ont-ils expliqué, « la maison à l’étranger de tout un peuple ». Et notamment, « la maison des 1,5 millions d’équato-guinéens », a dit Maître Francisco Evuy Nguema Mikué, qui s’est confié à la sortie de l’audience, et qui a démontré qu’on « ne peut pas nier à son pays, la République de Guinée-équatoriale, sa bonne foi ».
Pour sa part, Maître Kevin Crossman, a plaidé pour que la Cour d’Appel reconnaisse à son client, l »’Etat de Guinée-équatoriale, « sa qualité de propriétaire de bonne foi, doublée de celle de victime de l’infraction sanctionnée ». Il a en même temps, demandé à la Cour « la restitution dudit bien à son client ».
Les avocats de la Guinée-équatoriale, se sont surtout basés sur la convention de Mérida, signée par la France le 9 décembre 2003 et ratifiée le 11 juillet 2005, qui prime sur le droit interne français, en application de l’article 55 de la Constitution du 4 octobre 1946. Maîtres Marsigny et Kevin Grossman ont rappelé à la Cour « que la restitution d’avoirs est un principe fondamental » de la convention de Mérida.
Et d’ajouter que « chaque Etat Partie, conformément à son droit interne, doit prendre les mesures nécessaires pour permettre à un autre Etat Partie d’engager devant ses tribunaux une action civile en vue de pouvoir reconnaître l’existence d’un droit de propriété sur des biens acquis au moyen d’une infraction établie conformément à la présente convention ; chaque Etat doit prendre les mesures nécessaires pour permettre à ses tribunaux d’ordonner aux auteurs d’infractions établies conformément à la présente convention de verser une réparation ou des dommages-intérêts à un autre Etat Partie ayant subi un préjudice du fait de telles infractions ».
On ne saisit jamais, une ambassade, on ne peut pas discuter la propriété du bien immobiliers de l’avenue Foch à la Guinée-équatoriale. C’est que Maître Grossman s’est évertué à expliquer. L’article 53 de la convention de Mérida impose à la France, selon l’avocat, « d’autoriser et de permettre la restitution directe, à un autre Etat Partie, d’un bien confisqué dont cet Etat serait propriétaire ». Il a surtout démontré dans sa plaidoirie que la République de Guinée-équatoriale est « un autre Etat Partie, à la convention de Mérida, puisque la GE l’a ratifiée, le 30 Mai 2018 ». La Cour a pris acte de sa plaidoirie et, a renvoyé le délibéré pour le 9 juin 2022.
Par Maurice Délévoyé, envoyé spécial au Palais de justice de Paris